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Innovation — Le 15 juin 2016

Pôles, clusters, filières : l’union fait la force

Orientés vers la mise au point de produits innovants, la conquête de nouveaux marchés, la mutualisation de moyens, les clusters, pôles de compétitivité, et différentes formes de regroupement montrent en Rhône-Alpes toute leur pertinence. Comment fonctionnent ces regroupements ? Qui sont leurs adhérents ? Pour quels résultats visibles sur le terrain ? Regard sur des collaborations qui dynamisent l’économie régionale !

© Fotolia

Depuis 2005, année de création des pôles de compétitivité, les regroupements professionnels fondés sur les réseaux et la coopération se sont multipliés et imposés comme des vecteurs incontournables du développement économique. En créant des synergies entre des acteurs d’un même territoire – entreprises de toutes tailles, laboratoires de recherche, établissements de formation, institutions… – et en animant cet écosystème, ils catalysent innovation, croissance et compétitivité. Dans un contexte mondialisé et ultra-concurrentiel, les entreprises intègrent ces réseaux à leur organisation stratégique. Les dirigeants ont compris l’intérêt de s’unir pour défendre les savoir-faire et les compétences locales face à des challengers internationaux et des donneurs d’ordres de plus en plus puissants. Partager des expériences, développer des projets collaboratifs innovants ou mutualiser les ressources augmente les chances de réussite, notamment celles des TPE et PME. C’est pourquoi les CCI soutiennent les différentes initiatives à travers le territoire.

En Rhône-Alpes, des filières clés – santé, chimie, mécanique, métallurgie, plasturgie, aéronautique, énergie, électronique/logiciel, numérique… – sont concernées. Plus de 3 000 entreprises adhèrent à l’un des 10 clusters ou des 12 pôles de compétitivité, parmi lesquels se distinguent deux pôles mondiaux – Lyonbiopôle dans le domaine des biotechnologies et de la santé (190 membres, dont 157 PME), et Minalogic pour les technologies du numérique (300 membres, dont 197 PME et ETI) – ainsi qu’un pôle à vocation mondiale, Axelera, spécialisé en chimie et environnement (322 adhérents, dont 137 TPE et PME).

Fédérer pour dynamiser les filières

L’un des principaux atouts des regroupements professionnels ? Réunir l’ensemble des acteurs afin de structurer de grands domaines d’activité, et de rendre lisible et visible un écosystème. De ces regroupements naissent également des stratégies communes pour réaliser des investissements structurants, proposer des offres à plus forte valeur ajoutée, gérer des ressources humaines ou développer les compétences. Plus compétitifs, les adhérents se trouvent mutuellement renforcés. C’est le cas avec le Pôle Innovations Constructives qui réunit, avec l’appui de la CCI Nord Isère, une centaine d’adhérents sur toute la chaîne de la construction durable. Il a ainsi permis la création d’une chaire multi-entreprises (Construction Rénovation Innovations constructives) en partenariat avec l’école nationale des travaux publics de l'état, grande école d’ingénieurs. Un dispositif innovant pour booster la recherche appliquée au service des projets des entreprises, et notamment des PME/TPE.

“En Haute-Savoie, l’émergence de la filière Image en mouvement et industries créatives a dynamisé l’ensemble du secteur. Regroupées sous un étendard clairement identifié, les sociétés savent où trouver les partenaires et les ressources clés. Elles gagnent ainsi en efficacité et en performance”, assure Yann Teyssier, directeur général d’ITycom (voir encadré). Avec 310 entreprises produisant des images pour le cinéma, l’audiovisuel, l’animation, le jeu vidéo et le multimédia, soit 18 % des entreprises régionales, la filière devrait connaître une montée en puissance et une accélération de sa croissance suite à l’inauguration en juin 2015 des Papeteries Image Factory. Basé à Cran-Gevrier, au cœur de l’agglomération d’Annecy, ce lieu totem de 7 000 m² réunit des bureaux, un espace de travail partagé, des logements et une pépinière d’entreprises dédiée au développement de start-up. “Ce bâtiment a été pensé comme un accélérateur où l’ensemble des entreprises de la filière bénéficie de ressources, d’accompagnements et des réseaux dans une logique de synergie, explique Mickael Marin, délégué général de la CITIA (Cité de l’image en mouvement) chargé de l’animation économique du lieu.

Dans cet esprit, plusieurs rendez-vous professionnels ponctuent la vie du site, notamment des matinales thématiques et des permanences d’experts en partenariat avec la CCI Haute-Savoie qui assure également le suivi des jeunes entreprises.” Ambition à terme ? Générer l’implantation de 200 à 300 emplois dans des activités d’avenir.

L’innovation comme focus

Encourager les projets collaboratifs de recherche et développement s’inscrit au cœur des missions des pôles et clusters. Les CCI territoriales soutiennent de nombreux groupements et incitent les PME à rejoindre des programmes communs favorisant la conception de produits ou services innovants. Dans la Drôme, la CCI figure ainsi comme co-fondateur chargé de l’animation de l’axe innovation d’Organics Cluster, le premier réseau d’entreprises bio en France (180 membres, dont 70 % de TPE). Dès sa création en 2006, le cluster a lancé Bio’Innov destiné à soutenir techniquement et financièrement huit projets innovants par an. “Ce programme a fait ses preuves, souligne Audrey Bouton, chargée de projet innovation. Par son format (huit demi-journées d’accompagnement sur un an) qui donne un rythme au projet, il est parfaitement adapté aux PME et TPE. Seules, elles n’iraient pas aussi loin si rapidement.”

Le cluster cherche également à impulser une dynamique d’innovation en analysant avec précision les évolutions du marché des produits bio, en croissance continue depuis 2007. Il a dernièrement développé une étude prospective sur l’avenir de ce marché à l’horizon 2025. “Ces informations essentielles permettent aux entreprises de comprendre les enjeux de la R&D pour s’adapter et savoir quelle stratégie gagnante adopter. À nous de les guider dans leur positionnement (création de nouvelles gammes, enrichissement des formules…). Nous montrons le potentiel de croissance et les axes sur lesquels innover pour se différencier et développer une activité pérenne”, analyse Audrey Bouton.

Accompagner le développement

Mais innover ne suffit pas. Les projets doivent arriver jusqu’au marché, et les produits et services qui en découlent rencontrer le succès. C’est le sens d’une réorientation globale assignée par l’État aux pôles de compétitivité. “La mission des pôles de compétitivité et des clusters a évolué. Le soutien des entreprises dans des domaines annexes à l’innovation a pris une place très importante”, confirme Nicolas Bertrand, directeur d’Organics Cluster. “Nous avons structuré nos actions afin d’accompagner les membres dans toutes les étapes de développement, comme la recherche de financements, la commercialisation, le marketing, l’export, etc.” Le directeur cite l’exemple de Kario. Cette PME implantée dans l’Ain, pionnière dans l’élaboration de compléments alimentaires et valorisant un savoir-faire ancestral, a élaboré un soda innovant. Suivie initialement dans le cadre du programme Bio’Innov, Kario a ensuite bénéficié d’un accompagnement marketing et commercial (rencontres acheteurs, présence sur les salons…) qui lui a aujourd’hui permis d’être référencée en magasins bio et dans la grande distribution.

Mutualiser pour renforcer la compétitivité

De même, la mutualisation de fonctions et de moyens progresse. L’objectif est ici de compter sur les synergies des acteurs pour améliorer la performance et la compétitivité. Plusieurs initiatives concrètes se déploient, notamment en matière de ressources humaines et d’évolution des compétences. Pour répondre aux attentes de leurs adhérents, des groupements ont ainsi soutenu la mise en place de formations initiales et continues en partenariat avec les établissements académiques et les centres de formation des CCI. “Digital Grenoble et les clusters sont à l’écoute des problématiques rencontrées par leurs membres en matière d’emploi. En prise directe avec la réalité économique des territoires, ils peuvent anticiper les évolutions et les besoins futurs des entreprises en proposant les formations adaptées”, relève Ralf Gathmann, responsable du projet Digital Grenoble Campus (voir encadré).

Même préoccupation pour le secteur de la logistique en Rhône-Alpes qui rassemble “157 000 salariés, principalement autour des activités du transport de marchandises et de la logistique, soit 12 % des emplois nationaux”. Gérer les compétences s’inscrit logiquement comme l’un des enjeux pour les deux groupements de la filière, le Cluster logistique Rhône-Alpes et le Pil'es (Pôle d'intelligence logistique). Ce dernier, fort de 120 adhérents (dont 70% d'entreprises de l'écosystème logistique), a lancé une démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences en Nord Isère, en partenariat avec notamment l’État et la Région, pour répondre aux problématiques RH – fidélisation des salariés, gestion des pics d’activité, formation, attractivité des métiers, sécurisation des parcours professionnels – et mutualiser les coûts des initiatives.

“Chasser en meute” pour gagner des marchés

Dans un contexte ultra-concurrentiel, les groupements deviennent aussi d’importants catalyseurs de croissance en apportant une réponse concrète aux TPE et PME qui ne pourraient pas percer seules sur des marchés d’avenir. “Faire se rencontrer l’ensemble des acteurs d’une filière (clients, fournisseurs et distributeurs) et leur donner une meilleure connaissance des ressources locales vise à construire une démarche partenariale globale, souligne Georges Mauer, président du Pôle d’excellence AFT (Aéraulique, frigorifique et thermique). Il s’agit de créer de nouveaux courants d’affaires en menant des projets communs plus ambitieux, en répondant à des appels d’offres pour lesquels une PME ne pourrait pas soumissionner seule, voire en sous-traitant lors d’un surplus d’activité.” Les nouvelles parts de marché se gagnent à l’échelle mondiale. Et les regroupements ont un rôle à tenir dans le processus export, en lançant notamment des actions collaboratives. Le Cluster Montagne, né de la fusion de deux entités tournées vers l’international (le Cluster des industries de la montagne, initiative de la Région Rhône-Alpes animée par la CCI Savoie, et France Neige International), est imprégné de cette culture. “Notre rôle majeur tend à représenter et valoriser la filière française de l’aménagement de montagne à l’international, et à instaurer des actions collectives comme l’accueil de délégations, la mise en place de missions de prospection ou l’organisation de pavillons collectifs sur les grands salons internationaux, indique son directeur Benoît Robert.

À l’occasion du salon Mountain Planet de Grenoble, le cluster a accueilli 24 délégations représentant 21 pays, soit plus de 200 décideurs qualifiés, pour lesquels il a établi un programme spécifique entre visites du salon, de ses entreprises et de ses stations. “Notre mission est de faire l’interface entre leurs besoins et les savoir-faire de nos membres”, ajoute Benoît Robert. Le cluster positionne également l’expertise française dans l’organisation des Grands Evénements Sportifs Internationaux (GESI) des “nouveaux” pays du ski (Turquie, Russie, Inde, Chine…). Les JO de Sotchi en 2014 ont ainsi été l’occasion de placer les savoir-faire d’une quinzaine d’entreprises du Cluster Montagne dans des domaines aussi variés que les remontées mécaniques, la neige de culture, la prévention des risques d’avalanche… Prochaine cible : la Chine qui accueillera les JO de 2022, mais aussi l’Amérique du Nord et du Sud, la Russie, le Proche-Orient, l’Asie… Le Cluster Montagne couvre les zones où le développement s’accélère et ouvre de nouvelles opportunités. La stratégie convainc. Sur 170 entreprises membres, 63 % sont présentes à l’international et 71 % ont des projets de développement à l’international.

Des défis à relever

Il reste encore beaucoup à faire pour élargir le cercle des TPE et PME membres d’un groupement. “Nous avons observé une meilleure prise de conscience, mais nous devons encore mener un long travail de sensibilisation pour leur faire comprendre qu’elles ont une nécessité vitale à s’ouvrir à d’autres afin d’anticiper des technologies, des compétences, des marchés, constate Patrick Vuillermoz, directeur du pôle de compétitivité Plastipolis (405 adhérents répartis en 250 entreprises, 95 centres de recherche et développement,60 institutionnels et partenaires). Nous devons montrer qu’elles peuvent développer leur business en propre tout en collaborant, prouver qu’un groupement n’est pas élitiste, mais répond à des problématiques concrètes et génère un retour direct sur investissement.” Un rôle de pilote pleinement assuré par Plastipolis, récemment distingué par le Sénat pour la performance de ses démarches de management.
R. Broz

Chiffres clés en Auvergne-Rhône-Alpes

• 15 pôles de compétitivité parmi les 71 labellisés en France, dont 12 en Rhône-Alpes
• 19 clusters, dont 10 en Rhône-Alpes• 6 Très Grandes Infrastructures de Recherche
• Dépense intérieure en R&D (2013) : 6,5 Md€, soit 14 % du total national et 2,67 % du PIB régional
• 4e région de l’Union européenne pour le nombre de demandes de brevets
• 16,7 % des entreprises et 19,7 % des centres de recherche français engagés dans des conventions industrielles de formation par la recherche (CIFRE) se situent en Auvergne-Rhône-Alpes.

Sources : INPI 2014, OST, ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Eurostat

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