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Présences Grenoble
Aménagement — Le 30 juin 2025

Laurent Marmonier, président de la CAPEB Isère : « L’instabilité de MaPrimeRenov est délétère... »

Laurent Marmonier, président de la CAPEB Isère : « L’instabilité de MaPrimeRenov est délétère pour nos entreprises, pour les ménages et l’efficacité énergétique du bâtiment »

© Adobestock

Que représente l’activité de rénovation pour les entreprises de la CAPEB ? 

Laurent Marmonier : Notre organisation professionnelle fédère 62 000 entreprises artisanales du bâtiment, de tous corps d’état, au niveau national et 1 200 en Isère. Il s’agit bien d’un sujet central, puisque l’essentiel de l’activité des entreprises artisanales du bâtiment porte sur les travaux d’entretien, de rénovation, de restauration du bâti. Seules 1% des sociétés adhérentes à la CAPEB interviennent exclusivement dans le neuf. Quelques chiffres encore révélateurs : 99% des entreprises du bâtiment ont entre 0 et 20 salariés. Or plus de 60% du chiffre d’affaires de ces sociétés est réalisé dans l’entretien et l’amélioration de bâtiments… 

Dans ce contexte, comment a été reçue l’annonce du gouvernement, le 5 juin, de suspendre le dispositif MaPrimeRenov ? 

LM : En 2024, la CAPEB avait déjà enregistré 14 000 fermetures d’entreprises, et 27 000 suppressions d’emplois du fait d’une conjoncture très dégradée dans le bâtiment. Au 1er trimestre 2025, la construction neuve se repliait encore de -10% par rapport au 1er trimestre 2024, l’entretien-rénovation de -1,4% et les travaux d’amélioration de performance énergétique du logement de -1%. La suspension soudaine de MaPrimeRenov a donc signé un nouveau coup dur, tant pour les entreprises artisanales, que les ménages. Cette instabilité dans les dispositifs est le signe de l’absence de vision à long terme de l’État dans la transition énergétique. Depuis 1973, sept règlementations thermiques se sont succédées, et nous connaissons surtout la 31ème modification du dispositif MaPrimeRenov en quatre ans ! Il y a deux ans encore, l’État avait renoncé à soutenir les mono-gestes (comme le remplacement de fenêtres ou l’équipement en pompe à chaleur), au profit des rénovations d’ampleur. Cette approche, estimée beaucoup trop coûteuse pour les finances publiques, vient d’être abandonnée, avec un appui de nouveau aux mono-gestes ! Les entreprises comme les particuliers ne peuvent gérer de tels revirements de politique publique… 

Une sur sollicitation de MaPrimeRenov, comme des fraudes massives, ont été évoquées par l’État… 

LM : À la CAPEB, nous n’avons jamais été en faveur d’un financement, jusqu’à 90% pour les ménages modestes, délivré par l’ANAH aux travaux de rénovation globale. Cela revenait à aider sciemment un petit nombre de dossiers, sur des montants importants, et donc à renoncer à avoir un plus large impact, tout en suscitant l’intérêt des fraudeurs ou des chasseurs de prime. Plus largement, la succession de dispositifs à courte vue et changeant tout le temps n’ont fait que favoriser, tour à tour, les fabricants et installateurs de panneaux photovoltaïques, de fenêtres, de pompes à chaleur… Comme les évolutions de la réglementation thermique ont priorisé, successivement, l’électricité, le gaz, puis le tout électrique de nouveau… Nous qui intervenons chez les particuliers constatons les effets de ces politiques successives, avec différentes générations d’équipements présents au gré de ces incitations, malheureusement souvent en panne, ou mal posés par des non spécialistes. Pour éviter les effets d’aubaine générés par les aides, nous préférons un crédit d’impôt attribué aux particuliers ou aux entreprises après des travaux effectivement réalisés. 

Quelles pourraient être les améliorations apportées, pour un dispositif véritablement vertueux ? 

LM : Deux points annoncés vont dans le bon sens. Le retour aux mono-gestes est positif car plus accessible au budget des particuliers. La Capeb défend de son côté un parcours de rénovation globale sur plusieurs années, intégrant une succession de gestes ou un bouquet de travaux, avec une bonification des aides publiques en fin de parcours. La possibilité pour les entreprises de se constituer en groupements momentanés d’entreprises, sans solidarité, associant par exemple un maçon, un plombier-chauffagiste, un couvreur, pour réaliser des rénovations énergétiques de plus grande ampleur, dans la durée, constitue aussi une avancée. Mais nous demandons surtout qu’à une succession de dispositifs, sans rationalité, soit substituée une politique de long terme, véritablement efficace dans la réduction des émissions carbone du bâtiment. Inspirons-nous pour cela de ce qui a été évalué et fonctionne ailleurs. L’Autriche, par exemple, a réalisé des performances remarquables sur son parc de logements grâce à une politique cohérente, s’inscrivant dans la durée, qui peut à présent s’appuyer sur des retours d’expérience et des intervenants formés, connaissant très bien leur sujet. À ce titre, en France, savez-vous que les élèves des formations en CAP et BP sont encore formés selon les référentiels des réglementations thermiques des années 70 et 80 ? Ils entrent donc dans nos entreprises en devant déconstruire tout ce qu’ils ont appris… Nos organisations professionnelles luttent depuis des années pour faire entrer les nouvelles prescriptions et exigences liés aux problématiques énergétiques et aux réglementations prescrites par l’État dans les référentiels de l’Éducation nationale. Pour l’instant sans succès…

E. Ballery

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