Philippe Badaroux : "Nous voulons diffuser une culture de la lumière en France”
Philippe Badaroux, dirigeant de BH Technologies, a été élu président du Cluster Lumière en mai dernier. Ce réseau créé à Lyon rassemble 170 professionnels de la filière éclairage en France. Revue des ambitions, des projets du Cluster et de la société grenobloise BH Technologies.
Quelle est la finalité du Cluster Lumière ?- Il s’agit de fédérer la filière de la lumière “Made in France”. Nous voulons valoriser les savoir-faire, l’excellence des entreprises qui existent sur le sol national et les faire rayonner à l’international. Le Cluster Lumière a été fondé en 2008 à l’initiative de cinq partenaires, dont la CCI de Lyon, dans une métropole reconnue depuis les années quatre-vingt-dix comme la Ville lumière. Nous fédérons 170 membres, et animons depuis 2014 le projet Lumen qui a l’ambition de devenir un centre de compétences mondial de la lumière. Ce programme associe des PME innovantes avec des laboratoires de premier plan, dont bien évidemment le CEA, pour des applications irriguant de nombreux secteurs d’activité – bâtiment, collectivités territoriales, santé… –, visant à la fois l’amélioration de l’éclairage et la réalisation d’économies d’énergie.
Quel constat dressez-vous de la maturité de ces sujets ? Nous disposons d’une faible culture de la lumière en France. Combien de fois ai-je l’occasion de me déplacer dans des entreprises, des restaurants ou des hôtels éclairés par des néons au plafond ! Cela favorise l’entrée de fabrications bas coûts, et contribue aussi à l’inconfort des salariés et à la faible attractivité de lieux de vie. C’est désormais démontré : les places publiques de villes bénéficiant d’un éclairage étudié s’animent pendant la belle saison et favorisent le développement économique. J’ajoute que la lumière a toujours entretenu dans l’histoire un lien à la fois social, sociologique et sécuritaire. Dans les années quatre-vingt-dix, elle a aussi pris des dimensions urbanistiques et esthétiques par la mise en valeur du patrimoine. Certaines cités comme Paris, Lyon, Chartres, Shanghaï, Singapour, Saint-Pétersbourg en ont fait un argument touristique qui attire des millions de visiteurs... Puis les années deux mille ont signé les débuts de la préoccupation énergétique, ce qui a pu freiner cette dynamique. Et pourtant, le Grenelle de l’Environnement et les législations portant sur la transition énergétique ont très peu abordé la thématique de l’éclairage. Or ce poste représente près de 40 % du budget énergie des municipalités !Voilà donc qui nous relie directement au métier de BH Technologies…Exactement. Diplômé de l’Inpg, ingénieur technologue et technophile, j’ai passé une grande partie de ma carrière dans des groupes internationaux, sur des projets de R&D électronique appliqués à l’aérospatiale ou l’automobile. Puis je me suis posé la question de créer ma propre entreprise pour apporter des concepts nouveaux, et je me suis intéressé à l’éclairage urbain. En 1998, j’ai fondé BH Technologies avec mon associé Éric Habib. L’activité des villes dans ce domaine s’apparentait alors à un métier d’allumeur de réverbères. La priorité consistait à éclairer tous les quartiers en même temps afin de ne pas donner le sentiment d’en privilégier un plutôt qu’un autre – ce qui suscitait des interprétations et des plaintes récurrentes –, et cela au bon moment du crépuscule.
Nous avons commencé à mettre en place des solutions de pilotage et de synchronisation automatisées de l’éclairage public. Elles sont aujourd’hui encore référentes sur le marché.Des évolutions fortes se sont ensuite présentées…Oui, le sujet de l’optimisation énergétique est apparu dans les années 2000, et il devenu prégnant à partir de 2010 du fait d’une hausse massive du prix du kWh. Avec le renchérissement des taxes associées, le coût de l’éclairage public a augmenté de 22 % pour les municipalités sur la seule année 2011 ! En parallèle, la technologie des leds apportait une réponse partielle aux exigences d’économie. Partielle, parce qu’il était hors de question pour les collectivités touchées par les baisses de dotation de renouveler 100 % des luminaires. Nous avons su apporter une réponse adaptée, en proposant des solutions d’optimisation du parc existant, et évolutives vers les technologies à leds. Des villes comme Besançon, Troyes, ont saisi l’opportunité de réaliser des économies massives et rapides. L’optimisation consiste à apporter la juste intensité d’éclairage aux moments où les besoins se font sentir – à la sortie des écoles et quand la population rejoint son domicile –, puis de la diminuer fortement au cours de la nuit. Des villes ont ainsi réussi à atteindre plus de 50 % de baisse de consommation en 18 mois. Une boucle vertueuse, avec limitation volontaire, s’est instaurée. Nos clients ont déjà divisé par deux leur consommation et sont en route pour atteindre le facteur 4 avant 2020, bien avant les exigences de la Cop 21 ! BH Technologies propose ainsi une stratégie réaliste et ambitieuse, qui va jusqu’à contrôler avec eux les résultats obtenus.
E. Ballery
Infos clés
- BH Technologies : Solutions globales de gestion de l’éclairage public et d’optimisation de la collecte des déchets en apport volontaire, pour les collectivités locales.
- Siège à Grenoble, site de production en Normandie.
- 42 personnes, dont 30 à Grenoble
- CA prévisionnel 2016 : 11 M€ (7,5 M€ sur l’éclairage, 3,5 M€ sur les déchets).
A savoir
- Le Cluster Lumière compte lancer un salon spécialisé mettant en avant toutes les lumières
Commentaires
Ajouter un commentaire