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Experts — Le 28 mai 2025

Didier Boulogne, Business France : « Les entreprises doivent revoir leurs scénarios à l’export »

Comment surmonter l’instabilité générée par l’annonce américaine sur les droits de douane ? Business France, agence née en 2015 de la fusion entre Ubifrance et l’Agence française pour les investissements internationaux, est chargée d’attirer les investisseurs étrangers en France et d’accompagner les entreprises à l’export. Elle est l’un des piliers de la « Team France Export », en lien avec le réseau des CCI. Son directeur général délégué export, Didier Boulogne, se prononce sur ce contexte inédit.

Didier Boulogne, directeur général délégué export
Didier Boulogne, directeur général délégué export © F. Ardito

Comment ont réagi les entreprises exportatrices, à l’annonce de droits de douane d’un montant sans précédent par le président Donald Trump, le 2 avril ? Avec sidération, combativité… ? 

Didier Boulogne Il y a eu un peu de tout cela à la fois. Nos équipes, comme les entreprises que nous accompagnons, étaient préparées au changement de politique commerciale aux États-Unis. Ce revirement était communiqué dès la période de campagne électorale en 2024. Mais personne n’imaginait une annonce d’une telle brutalité qui a stupéfié le monde entier. Passé le choc initial, de nombreux entrepreneurs sont revenus vers nous avec cette réaction : « Nous avons déjà affronté la pandémie de Covid, nous surmonterons bien cette nouvelle crise ». Comparer l’impact des droits de douane à celui du Covid en dit long. Parce que les dirigeants ont bien compris qu’il ne s’agissait pas d’un épiphénomène, mais qu’ils entraient dans une nouvelle ère, marquée par un changement de dogme. 

Comment avez-vous d’abord répondu aux interrogations des entreprises ?

Le besoin d’information a été immédiat. Les entreprises ont tout de suite cherché à vérifier si elles étaient concernées, et si oui « comment », et en corollaire « combien » cela allait leur coûter. Dans les impacts possibles, il y a certes les taux de droits de douane à intégrer, mais aussi les conséquences sur le business model à évaluer. Dans la première hypothèse, si le prix des produits, même plus élevé, reste acceptable, l’accélération reste souhaitable sur les marchés américains. S’il devient prohibitif, alors il faut revoir l’offre produits, voire toute la stratégie export ! Un webinaire, organisé dès le 17 avril avec des experts de la direction générale du Trésor, la direction générale des douanes et droits indirects, et nos responsables de pays aux États-Unis, a d’emblée permis de délivrer les informations et analyses nécessaires. Plus de 1 500 entreprises se sont connectées en direct. Ce webinaire reste consultable en replay. Il s’inscrit dans un dispositif plus large mis en place par Business France, en coordination avec ses tutelles et partenaires, pour informer et orienter les entreprises impactées. Parallèlement, une hotline installée par la DGT et la DGDDI permet d’apporter des réponses aussi précises que possible aux conjonctures particulières. Les interrogations des entreprises sont profondes. Et même s’il y a eu un report de trois mois, nous sommes tous d’accord pour dire que la situation devrait encore rebondir. 

Dans un tel contexte, que préconise Business France ?

Notre conseil numéro un est de saisir l’opportunité, à l’aune de cette crise, de renforcer ce que nous ne cessons de défendre : la diversification géographique des marchés. Je dis bien diversification et non substitution, car la taille, les caractéristiques, les atouts américains sont tels, qu’il n’est pas concevable de renoncer à ce débouché numéro un pour certaines entreprises. La création d’une implantation commerciale peut en revanche être souhaitable, les Américains appréciant de discuter ou de négocier avec un représentant sur place. Mais les entreprises doivent aussi considérer avec plus d’attention leurs marchés de proximité. L’Italie enregistre d’excellents résultats à l’export en ciblant prioritairement la Suisse, l’Allemagne, la France. À ce titre, les entreprises ont-elles pleinement exploré le potentiel de nos pays voisins ? Par ailleurs, des nations du Moyen-Orient, comme les Émirats arabes unis ou l’Arabie saoudite, demeurent extrêmement actives. L’Asie du Sud-Est apparaît certes plus difficile à pénétrer face à la stratégie de conquête très agressive de la Chine, mais certaines entreprises y enregistrent de très beaux succès, par exemple en Thaïlande, en Indonésie, au Vietnam. Reste évidemment l’Inde, un immense marché, complexe, ou le Brésil où l’on présente également des solutions. Business France est implantée dans 53 pays représentant 95 % du commerce mondial, avec 1 400 interlocuteurs, dont 800 à l’étranger. De nombreux accompagnements existent pour se développer encore à l’international ! 

Plus largement, à quels effets à plus long terme s’attendre ? Assisterons-nous à un recul des échanges internationaux ?

Il est encore trop tôt pour chiffrer précisément cette conséquence, mais un ralentissement est probable. Dans le même temps, les premiers acteurs impactés par les droits de douane sont les importateurs américains : quand les marchés se ferment, les flux se détournent. Il faut également s’attendre à un effet rebond des exportations chinoises vers l’Europe, puisqu’elles ne se placeront plus vers le marché américain. Tout dépendra alors de la réponse européenne. Mais si les annonces américaines sur les droits de douane suscitent une désorganisation des entreprises et des flux au niveau mondial, les opportunités de développement à l’international ne disparaissent pas. Saisissons-les ! 

La France compte un peu plus de 150 000 entreprises exportatrices. L’objectif de Business France est qu’elles continuent de performer à l’international. Et de franchir le cap de 200 000 exportateurs.

E. Ballery

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