Stellaria lève 22 M€ en vue d'industrialiser ses réacteurs
La start-up grenobloise, fondée en 2023, vient de lever 22 M€ et de signer un contrat stratégique avec Equinix, géant mondial des data centers. Son ambition : mettre au point d’ici dix ans un réacteur nucléaire de nouvelle génération, compact, sûr et à combustibles renouvelables, au potentiel inédit.

Créée en mai 2023 par des experts du CEA, de l’ILL et de Schneider Electric, Stellaria travaille sur un réacteur nucléaire nouvelle génération, compact et intrinsèquement sûr. Une technologie qui séduit déjà des industriels importants. La start-up vient ainsi de signer un contrat commercial avec l’américain Equinix, expert des infrastructures numériques et exploitant plus de 260 datacenters à travers le monde. L’accord prévoit le développement conjoint de réacteurs et de datacenters de grande taille pour les besoins de l’IA, qui deviendraient alors autonomes en énergie.
« Nous nous engageons à préréserver 500 MW électriques pour leurs infrastructures au-delà de 2035 », précise Nicolas Breyton, cofondateur et CEO de Stellaria. La collaboration inclut un soutien financier, avec deux premières tranches qui ont partiellement contribué à la levée de 22 M€, auxquelles s’ajoute une troisième tranche qui sera synchronisée avec la prochaine levée de fond, sous réserve de jalons techniques atteints.
Une technologie de rupture
Le cœur de l’innovation repose sur un réacteur à sels fondus de 250 MW électrique ou 530 MW thermique, soit un quart de tranche nucléaire. Conçu pour être modulaire et souterrain, il intègre des systèmes de sûreté passifs, comme la possibilité d’évacuer le combustible liquide par gravité. « De plus, le sel fondu se dilate, ce qui permet d’adapter la puissance très rapidement et d’éviter tout emballement. Même en cas de rupture du circuit primaire, la réaction s’arrête naturellement », explique le dirigeant.
Autre atout : la durabilité. Le réacteur peut fonctionner avec de l’uranium appauvri ou du combustible usé issu des centrales existantes, proposant une solution de recyclage tout en brûlant ses déchets de haute activité à vie longue. Un changement de paradigme dans un contexte où la demande mondiale en uranium pourrait bientôt dépasser l’offre.
Une ambition industrielle affirmée
Stellaria a déjà réalisé son avant-projet sommaire de réacteur commercial et sa déclinaison en réacteur prototype, et collabore avec plusieurs partenaires de renom, dont le CEA, le CNRS, Schneider Electric et Technip Energies, ainsi qu’avec des PME locales spécialistes de la conception nucléaire, comme la société Epri. La levée de fonds doit permettre d’étoffer l’équipe – actuellement de 21 personnes – et de préparer la demande d’autorisation pour la construction d’un prototype,probablement à Cadarache, au début des années 2030. Au-delà de la prouesse scientifique, l’enjeu est industriel et commercial. La société ne prévoit pas de vendre de kilowattheures ni de construire elle-même ses centrales, mais de fournir des systèmes cœur à sels fondus intégrés par de grands groupes d’ingénierie. « Si nous réussissons, ce sera le premier réacteur à sels fondus et à neutrons rapides au monde, avec un déploiement international. Déjà, le marché se montre réactif, et des clients nous sollicitent directement. » Avec ce contrat majeur et ces nouveaux financements, Stellaria s’impose comme un acteur stratégique de la transition énergétique, à la croisée du nucléaire de nouvelle génération et des besoins massifs en énergie du numérique.
L. Marty
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