Ce que nous enseignent les évolutions des défaillances d’entreprises dans le monde
L’indicateur vaut ce qu’il vaut. Il n’est pas parfait et ne dit rien de l’essentiel, notamment de ce qui constituerait des marqueurs de la bonne santé des entreprises. Le taux de défaillances d’entreprises reste cependant particulièrement scruté en période de difficultés économiques. Il livre toujours en effet des enseignements sur les effets d’une polycrise devenue permacrise .

Des différences notables entre grandes régions
De récentes études conduites par Altares et Dun & Bradstreet fournissent des visions à la fois complémentaires et concordantes des évolutions selon les pays et grandes régions du monde. Car les mêmes causes ne produisent pas partout les mêmes effets. D’abord parce que l’exposition à ces causes n’est pas identique pour tous, ensuite parce que les conditions locales demeurent déterminantes.
Si le premier semestre 2025 a été marqué par une recrudescence des défaillances d’entreprises à l'échelle mondiale, notamment en Europe, dans les Amériques et en Asie, la Chine tire clairement son épingle du jeu, au contraire des États-Unis, de l’Inde ou de l’Allemagne, qui souffrent particulièrement.
Des conditions macroéconomiques défavorables pour tous
Les difficultés financières des entreprises trouvent à peu près partout les mêmes origines : réduction de la demande mondiale, et souvent locale, tensions sur les conditions monétaires, réduction des soutiens des gouvernements et accélération des remboursements des prêts obtenus en période de pandémie, hausse des taux d’intérêt, retour de l’inflation, coûts encore non amortis des restructurations des chaînes d’approvisionnement… Dans un tel contexte, il est plus compliqué pour les entreprises fortement endettées et aux bénéfices relativement faibles de trouver de nouvelles sources, vitales, de financement.
Rien d’étonnant, finalement, à ce que les pics de faillites les plus significatifs, entre 2023 et 2024, aient été observés dans des pays aussi divers que, par importance décroissante, l’Ukraine, Singapour, le Bélarus, l’Australie, le Canada, la Roumanie et les Pays-Bas. Si la France limite en partie la casse, les défaillances observées dans l’Hexagone n’en ont pas moins augmenté ces derniers mois, selon les dernières statistiques de la Banque de France.
Des évolutions positives notables
Sur la même période, la Grèce, la Colombie, la Chine et la Russie ont enregistré de fortes réductions des taux de défaillances de leurs entreprises, qui s’expliquent parfois simplement par un rééquilibrage, faisant suite à une période marquée par des taux anormalement élevés. Le cas de la Chine s’avère intéressant et riche d’enseignements. En 2024, les défaillances d’entreprises y ont baissé de 31 %, alors même que la majorité des pays de la région voyaient l’insolvabilité des entreprises augmenter. L’action de la PBoC (la Banque populaire de Chine), qui a injecté pas moins de 70 milliards de dollars sur les marchés monétaires, n’y est pas étrangère. En comparaison, le durcissement des normes macroprudentielles de prêt de la RBI (Reserve Bank of India) explique sans doute en partie la hausse des défaillances d’entreprises de 18 % observée en Inde.
Au-delà de l’action des banques centrales, les conditions de paiement négociées entre partenaires économiques demeurent un facteur d’explication clé. Comme toujours, la résilience de l’économie et de ses acteurs se nourrit bien davantage de pratiques collaboratives et partenariales, que de la logique concurrentielle et conflictuelle constatée dans les économies les plus en difficulté.
Hugues Poissonnier
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